Les hommes s’affrontent entre eux, ce n’est pas nouveau : depuis la nuit de temps les hommes s’affrontent !, l’opinion courante est de penser que c’est inévitable ! La prière du salve Regina parle de vallée de larmes ! Au temps de jésus en Judée, ce sont les Romains qui dominent la région. Le peuple hébreux est partagé : faut-t-il combattre l’occupant par les armes quitte à tout perdre ou bien faut-t-il s’accommoder de cette présence en conservant son identité comme on peut ? Devant un tel dilemme, que faut-t-il penser ? Les opinions sont diverses : depuis les partisans d’Hérode qui s’accommodent des romains jusqu’aux zélotes qui fomentent la révolte.
Au milieu de cette mélée, il y a quelqu’un qui échappe invariablement aux prises de positions partisanes. Quelqu’un qui ne prend pas part à cette mêlée : c’est Jésus. En parcourant sa vie publique, on ne peut pas trouver en lui un seul calcul humain partisan. Jésus dit et fait toujours le Bien autour de lui sans compromission avec l’esprit du monde. Jésus semble d’ailleurs être complètement insensible aux opinions des gens. Si Jésus n’émet jamais d’opinion, c’est parce qu’il est justement la Vérité comme Il le révélera à ses apôtres avant sa passion. L’opinion : c’est une option que l’on prend et qui contient toujours une part de ténèbres, c’est à cause de cela qu’elles s’affrontent.
Alors on est surpris par l’accroche des pharisiens et des partisans d’Hérode car au-delà de la flatterie évidente, l’éloge qu’ils font de Jésus est on ne peut plus juste :
Maître, nous le savons : tu es toujours vrai et tu enseignes le chemin de Dieu en vérité ; tu ne te laisses influencer par personne, car ce n’est pas selon l’apparence que tu considères les gens. Mais derrière cette juste et brillante analyse se cache leur calcul. Ils demandent à Jésus de leur donner un avis, une opinion !
Est-il permis, oui ou non, de payer l’impôt à César, l’empereur ?
Ils veulent inciter celui qui se tient au dessus de la mêlé à y rentrer pour le compromettre, le faire entrer dans le jeux de dupe de la discorde humaine !
Pourtant, Jésus va répondre à ses interlocuteurs comme il le fait toujours. C’est un piège qui lui est tendu : s’il répond par oui ou par non il tombera inévitablement dans l’arène avec ses détracteurs. La réponse de Jésus va sortir ses détracteurs de la controverse pour les remettre face à eux-mêmes et leurs incohérences: Ils se prétendent être du coté de Dieu, mais en tirant de leur poche cette pièce à l’effigie de César, ils se mettent du coté de César !
Jésus leur enseigne qu’il y a deux autorités : l’autorité temporelle, celle symbolisée par César et l’autorité spirituelle qui vient de Dieu. Le Christ n'est donc pas venu apporter aux hommes des solutions à leurs problèmes temporels. Il est venu transformer l'homme de l’intérieur pour qu'il puisse être sauvé.
Rendez donc à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu. Traiter les questions temporelles est bien sûr une nécessité. Pour nous, le monde actuel est devenu très complexe, et de fait propice au développement des opinions. Nous n’y pouvons rien, nous sommes dans l’arène, et nous vivons selon les règles humaines. Alors nous devons chercher à améliorer la société comme nous le pouvons : C’est ce que nous devons rendre à César ce qui est à César : Servir au mieux ce qui nous semble être l’intérêt général : Chercher la meilleur solution pour que tout se passe dans le plus de justice ! Mais nous devons aussi vouloir nous élever au dessus de tous les combats souvent inutiles et stériles qui servent les intérêts, voir les egos des uns et des autres. Alors à l’effigie de César, à cette image très humaine, viendra se substituer l’image de Dieu : Dieu créa l’homme à son image nous dit le livre de la Genèse. Il s’agit d’une tout autre effigie, d’une toute autre autorité aussi : celle que l’on reçoit de Dieu en vue du Bien commun et non plus en vue de l’intérêt général… C’est ce qu’est venu apporté le Christ au monde. C’est grâce au Christ que nous pouvons rendre à Dieu ce que Dieu nous donne. La transformation du monde se fait d’abord dans le Cœur de chaque l’homme. C’est le prérequis pour faire advenir le Bien commun. En terme Évangélique le Bien Commun : c’est le Royaume des Cieux, et on ne mesure pas le royaume des cieux à l’état du monde !
Depuis la nuit de temps les hommes s’affrontent : c’est l’opinion fataliste, une idée qui habite la pensée de beaucoup d’hommes. Elle oublie tout ce qu’il y a de bon dans l’homme et ce qu’il a su construire au long des ages. Mais Jésus n’est pas un idéaliste loin s’en faut ! Dieu gouverne mystérieusement le monde : ses voies ne sont pas nos voies. Déjà du temps de l’exil à Babylone, Dieu avait changé le cours de l’histoire en changeant le cœur de Cyrus le roi des Perces ! Les chrétiens ont la chance unique de pouvoir mettre en quelque sorte une image sur le Bien Commun de toute l’humanité, cette image c’est celle du Christ. Nous devons d’autant plus rendre à Dieu ce don qu’il nous fait, c’est a dire aimer son prochain. Mais cela passe aussi par rendre à César ce qui est à César, c’est à dire par rendre notre société la plus humaine possible. C’est ce qu’a fait Jésus durant sa vie publique sans jamais prendre parti pour qui que ce soit ! … Il est passé en faisant le bien dit l’écriture. Alors face au difficulté du monde, c’est en Lui que nous croyons.
Amen
P. Pascal Desbois
Is 45, 1.4-6 ; Ps 95 (96), 1.3, 4-5, 7-8, 9-10ac ; 1 Th 1, 1-5b ; Mt 22, 15-21