Une veuve apparaît dans 3 textes aujourd’hui : la veuve de Sarepta dans le livre des Rois, la veuve et l’orphelin sont soutenus par le Seigneur dans le psaume, et cette pauvre veuve qui donne son obole au Temple dans l’évangile, qui donne le peu qu’elle a. Il semble que dans l’Ancien Testament et à l’époque de Jésus, les veuves étaient systématiquement pauvres, car elles n’héritaient pas des biens de leur mari défunt. Aujourd’hui, il y en a sûrement parmi vous, le veuvage est toujours une pauvreté, même si elle n’est pas toujours matérielle. C’est la pauvreté de se sentir seul(e), de même que les orphelins éprouvent toujours le manque de leur père ou de leur mère.
Ici, le veuvage s’accompagne d’une descente dans l’échelle sociale. Mais pas dans le plan de Dieu. La veuve de Sarepta va porter assistance, dans son indigence, à Elie, et on sait quelle grande place a Elie dans l’histoire sainte. Il a pu accomplir sa mission de prophète parce qu’il a été assisté par une pauvre veuve. Dieu a participé à cette assistance en faisant que la jarre de farine et le vase d’huile ne s’épuisent pas. Dieu est présent à ceux qui sont indigents, pas seulement pour les assister mais pour leur confier des missions.
Ce n’est pas l’argent qui doit diriger le monde ou le Temple, c’est le cœur. Notre pape le dit bien dans sa dernière encyclique sur le Sacré Cœur de Jésus. Le Sacré Cœur de Jésus irrigue notre cœur qui est le centre de notre personne. L’intelligence compte, le corps compte, mais le cœur, qui permet d’aimer, est central. La veuve de l’évangile, elle donne ce qu’elle a à travers ses piécettes parce qu’elle aime Dieu qu’elle vient prier. Elle est reconnaissante pour la présence du Seigneur dans sa vie, même si cela ne se traduit pas par une richesse matérielle. Elle donne ce qu’elle a, elle donne ce qu’elle est, elle se donne pour sa foi, et c’est ce qu’admire Jésus. Il l’admire plus que ceux qui sont plus riches qu’elle, qui donnent plus d’argent qu’ils puisent dans leur superflu, alors qu’elle donne son nécessaire.
Cette veuve a un rôle prophétique elle aussi. Elle annonce Jésus qui va se donner lui-même, donner sa vie pour nous sauver. Le salut n’est pas une question d’argent, même si l’argent est nécessaire dans la vie.
L’argent doit être au service de tous, et en particulier de ceux qui sont dans le besoin. Il est nécessaire pour le service du Temple, mais le véritable Temple, nous fera savoir Jésus, c’est celui de l’Esprit-Saint, c’est celui de son Corps ressuscité. Nous devons donner tout ce que nous sommes pour ce corps, à l’image de la veuve, en commençant par offrir nos pauvretés.
Nous aussi nous sommes prophètes, de par notre baptême. Notre souci des plus pauvres dans la société d’aujourd’hui, pauvres au niveau matériel ou moral, migrants, personnes seules ou malades, personnes à la rue, ce souci et cette proximité sont prophétiques parce que Jésus a choisi de passer par eux pour se révéler, parce qu’ils sont premiers dans le Royaume. Notre mission de prophètes doit dénoncer les injustices comme le fait Jésus quand il dénonce ceux qui dévorent les biens des veuves.
Jésus n’est pas loin de son arrestation, de son don de soi jusqu’à sa mort injuste et sa résurrection. Nous le suivons sur ce chemin. Sachons nous dépouiller du superflu et donner notre nécessaire, c’est-à-dire notre cœur.
Jean-Christophe Cabanis
1 R 17, 10-16 ; Ps 145(146), 6c.7, 8-9a, 9bc-10 ; He 9, 24-28 ; Mc 12, 38-44